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Publié par Christian Hivert

bien

Arthur aussitôt s'emplit de son manque ressentit de Reine, et sourit pauvrement, jamais ce ne serait possible, jamais elle ne serait pour lui, jamais elle ne jouerait avec lui, allons donc il devait s'y résigner, avoir des relations avec les femmes sans tomber amoureux d'elles, il se sentit déchoir de ses rêves d'enfant.

 

Encore une qui n'est pas pour toi, au moins elle t'aura révélé la nudité de son corps et l'intimité de ses désirs, oui Dominique tout ce que tu celait sous tes longues et épaisses jupes de gitane baba-cool, j'étais si jeune, oui si jeune et si courtisée par des gens plus âgés, les sentiments de tes importances.

 

Cela avait toujours été ainsi, depuis sa première sortie au jour, encore poissé des réminiscences fœtales, il avait connu le manque de toute présence aimante, et jeté au monde des angoisses il avait survécu déjà à son placement dans une pouponnière, l'appartement parental était trop petit.

 

Plus tard huché sur ses trois ans consolidés il avait été présenté à son frère plus âgé et immédiatement rejeté avec une force et une énergie jamais démentie, il avait périclité jusqu'à l'adolescence et avait aimé la seule jeune fille au monde jamais disponible pour lui, avait survécu depuis.

 

Cette Dominique Premier, en constante conversation douce, acidorégulée, intemporelle, qui ne voudrait jamais le revoir, jamais avoir de nouvelles de lui, jamais donner des siennes, toujours rester à l'abri de sa carrière familialement prédestinée et de son avenir social dû de naissance.

 

Il lui avait encore fallu se confronter à un nouveau désir puissant, un amour irraisonné, Reine était apparue dans le soleil du bout de la rue des Vignoles, ses cuisses alanguies sous le rebondi du trottoir arpenté, chaque pas tressautant sa chair pas encore mure de jeune femme disponible.

 

Et Reine encore était disponible pour tous sauf lui, il avait habilement manœuvré pour figurer à sa cour et Nora avait brisé l'entente, de manière irrévocable, Reine avait sanctionné l'affront, avait fait joué toute son indifférence, qu'y avait-il donc de plus à vivre ou a perdre, maintenant Michèle.


Etaient donc venus les temps douloureux de l'homme endurant, sans affection ni regard pour les souffrances, abandonnant ses détachements dépassés, désavouant ses émois, enfouissant ses rêves idéaux, ses convoitises d'entente parfaite, ses attentes de conte à deux, l'attrait et la peau seuls.

 

Allons, ne désespère donc pas, tu la trouveras ta charmante, celle qui saura t'aimer et te retenir, le jour où tu auras moins d'idéal, moins d'utopie peut-être, lorsque tu te soumettras un peu à l'injustice du monde et des univers, pourquoi sommes nous là Dominique? Trouve ta réponse, personne ne sait rien.

 

Michèle lui  ayant mis tous les éléments manquants en main le renvoya un matin à son destin "Je crois que tu devrais maintenant te trouver une bonne copine, ne te fais pas bouffer, tu es parfois bien naïf, fais gaffe, nous sommes tous passés par là, bien peu ont résisté, chacun sa vie, bonne route"

 

Il l'avait aimé tout le temps de leur relation, il se sentait trop libertaire pour lui imposer le désir de sa présence, ils se revirent parfois avec le même plaisir mais la distance voulue par Michèle ne fut plus jamais franchie, Arthur en gagna une reconnaissance affectueuse inconnue de lui.

 

Il eut bien le temps par la suite de s'interroger sur les différences et les écarts que l'on mettait derrière les différentes sortes de transport amoureux, du simple appétit sexuel à l'attirance intellectuelle en passant par la passion obsessionnelle la plus maladive, jusqu'à la complice connivence de vie.

 

Reine même n'était pas parvenue à lui faire oublier la première des toutes premières jeunes filles aimées à l'adolescence, sa Dominique Premier, en train de finaliser son cursus universitaire dans les meilleures facultés de Paris et des Amériques, toujours lovée dans ses souvenirs.

 

Il avait attendu la réponse à sa lettre une quinzaine de jours, elle avait bien pris son temps, puis au milieu d'un couloir encombré de nombreux camarades, la très jeune Dominique Premier était venu lui saisir sa main en riant aux éclats, comme pour une bonne farce partagée, il avait fondu sous ses pieds.


Du gouffre ouvert il avait perçu anéanti ses quelques mots depuis ressassés à l'infini tangentiel, Je suis très touchée, mais je suis désolée, je n'éprouve pas les mêmes sentiments, soyons bons amis, et oui bons amis avait-elle dit, des bons amis qui ne s'étaient jamais revus, sauf une fois.

 

Une terrible fois où Dominique Premier l'avait à peine regardé, dans un concert où elle faisait face à trois étudiants le dévisageant de la tête aux pieds, il lui avait laissé son numéro de téléphone, elle n'avait pas rappelé, il s'était consolé, secrètement démis, dans la main de Nora à temps venue.

 

Au bar du concert, dans la salle de la Dame Bleue des éducateurs de l'éducation surveillée du CAES de Ris Orangis, Reine, Arthur et Nora avait bus aux éclats  les bières dorées, comme seuls le font les âmes cassées et les cœurs déchirés, soignant, maladroits, leurs solitudes désespérément associées.

 

Confronté à nouveau à son désarroi, renouvelé jusqu'aux confins extra sidéraux, de la séparation imposée par la femme et au refus d'accolement affectif, Arthur su sa vie entière consacrée à ses souvenirs de cette première jeune fille échappée des ses bras et du retrait de ce corps si désiré.

 

Demain il irait commettre son Premier braquage, en sortirait il libre, vivant, et enjoué, prêt à recommencer, la peur le prit entier, terrible et inefficace, mais il s'aperçut qu'elle ne rivaliserait jamais avec toutes ces anciennes peurs, jamais l'adrénaline ne les submergerait ni ne les égalerait.

 

Il était devenu plus fort, avait survécu à toutes les anciennes souffrances, l'envoûtement des frôlements aimants de Dominique Premier jamais ne seraient plus que des souvenirs lancinants et savoureux, il avait douze ans et n'était pas mort, il avait dix huit ans et n'était pas fou, il aimait.

 

Dominique Premier avait couru se jeter dans ses bras, c'était encore le moment le plus magique de sa vie, et elle s'était détachée, le félicitait de quitter le Lycée et ses parents, s'excusait de ne pas avoir ce courage, l'embrassait et le quittait, il avait été heureux et ne le serait jamais plus,

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