De l'excellent Guillon Claude…
ONFRAY SOUTIENT LA TERRORISATION DÉMOCRATIQUE. Il se prononce pour un «Patriot Act» à la française.
Interrogé sur la Radio suisse romande [à écouter à partir de 13′], le 8 janvier 2015, Michel Onfray, le professeur de philosophie, autoproclamé «libertaire», a pris parti pour une amplification répressive du système «antiterroriste» français, inspirée du «Patriot Act» américain.
Signalons au passage que le système européen, et notamment la définition politico-sociale élastique de ce qui peut être qualifié de «terrorisme» (tout!) est déjà inspiré du modèle américain. Mais il reste quelque garanties que Michel Onfray verrait disparaître sans nostalgie, nous allons voir pourquoi.
Que Michel Onfray soit un crétin politique est une information qui ne peut bouleverser que ses groupies. Qu’il brandisse le drapeau noir au service de l’union nationale et encense la police pose un vrai problème. Notamment pour cette autre variété de crétins «libertaires» qui continuent d’acheter ses livres ou de courir à ses conférences (sans œufs pourris et tomates trop mûres).
Il est vrai qu’ayant prôné un «capitalisme libertaire», le malheureux admirateur de Charlotte Corday ne fait qu’approfondir une pensée relativement cohérente en réclamant davantage de lois liberticides (s’il m’est permis d’user de ce pléonasme).
La manière dont l’Onfray expose son point de vue est sans ambiguïté. La manière dont il le justifie épuise la définition de l’imbécillité citoyenniste.
Au journaliste qui lui demande: «Est-ce qu’il faut aller jusqu’à un Patriot Act à la française?», Onfray répond:
Oui, mais ça me paraît évident. Moi par exemple j’ai pas grand chose à me reprocher, je ne crains pas la police; j’ai pas l’impression quand elle m’aborde qu’elle va me nuire.
Et comme le journaliste note que «pour un anarchiste» (c’est tout le problème coco!) cette position est surprenante, le prof entame une fumeuse comparaison entre Proudhon, d’une part, un type super (d’une misogynie pathologique, soit dit en passant), et les mauvais : Bakounine et Kropotkine.
Bakounine «est trop proche de Marx», ce qui en fait… un «idéaliste», figurez-vous !
Ancienne arme de poing.
Tout le contenu de la mer ne pourrait suffire à remplir les réservoirs de chasses d’eau nécessaires à renvoyer pareille ânerie dans les égouts de la confusion intellectuelle. Voilà qui impose de faire suivre le même chemin épuratoire à l’illusion indulgente (que je reconnais avoir partagée) selon laquelle «au moins, c’est un bon prof qui explique clairement les choses». Non, c’est désormais un idéologue, capable de raconter n’importe quoi pour défendre ses lubies.
L’argument, bien connu des pharmaciens et des garçons bouchers, «Je n’ai rien à cacher!» est particulièrement sot, et d’abord parce qu’il est presque toujours mensonger.
Simplement, le crétin qui l’utilise pratique la restriction mentale et élide la proposition suivante: «Certes, je dissimule (comme tout le monde) quelques menues infractions (au code de l’urbanisme, des impôts ou de la route) et quelques cochoncetés, mais ça n’a rien à voir avec ce qu’il est important de reprocher aux autres. Et on ne va tout de même pas venir me chercher des poux dans la tête à moi, qui suis un honnête citoyen travailleur de type caucasien.» Vous noterez que le menteur par omission milite pour la concision.
Par ailleurs, le locuteur suppose une équivalence logique qui n’existe pas entre la formule «Je n’ai rien à cacher (à me reprocher)» et une autre qui est «Donc je suis prêt(e) à tout montrer à la police quand elle l’exige».
Prenons un exemple. Dirais-je que j’ai à cacher mon cul, voire même que je me le reproche? Non, certainement pas. Peut-on en déduire que j’accepterais volontiers de le soumettre à vérification policière, et tousserais sur réquisition lors de contrôles d’identité pratiqués dans la rue et les transports en commun. Certainement non.
Rien à cacher, c’est à voir… Rien à montrer aux flics, c’est certain!
L’«argument» de l’innocente transparence, quand il est avancé par quelqu’un comme Onfray, dont on suppose (peut-être à tort) le QI et le niveau culturel au-dessus de ceux du viandard ci-dessus évoqué, devient une obscénité petite-bourgeoise particulièrement répugnante. En effet, cela revient littéralement à dire: «Puisque j’ai raison de ne rien craindre de la police, n’ayant rien à me reprocher, alors celles et ceux qui n’aiment pas la police et qui (ou parce qu’ils) ont des choses à se reprocher méritent de subir de sa part un traitement particulier (surveillance, brimades, répression).»
Énoncer pareille stupidité dans le monde réel et non dans un éther idéal revient à insulter les centaines de milliers de gens qui ont eu, ont et auront à subir des contrôles au faciès, des insultes, des comportements sexistes, des actes de violence physique et de torture de la part de policiers.
Mais le crétin n’a pas tout à fait fini de nous expliquer pourquoi il faut donner davantage de pouvoir aux flics et aux services secrets. Ce qui nous réserve un grand moment de matérialisme dialectique:
Je préfère [il parle de la surveillance d’Internet] être surveillé par des gens qui ont envie de penser la sécurité, plutôt que surveillé par des gens qui ont envie de me vendre des produits.
Attention ! la pureté chimique de cette connerie (pour employer un terme proudhonien) peut entraîner, chez les personnes sensibles, des réactions proches du malaise vagal.
Réfutons donc avec modération.
Le crétin ne distingue pas la cohérence de son propre délire. Partisan et du capitalisme et de la police, il ne voit pas que c’est le même système qui le surveille et qui lui vend des produits.
Ainsi donc, flics et barbousards «ont envie de penser la sécurité». Mais la sécurité de qui et de quoi? La tienne, petit bonhomme? Parce que tu aimes la police, qui va donc te le rendre, c’est ça?
Oh qu’il est mignon! Et il fait ses nuits maintenant?
Les flics «ont envie de penser la sécurité». Ils y pensent, d’ailleurs. Il finissent même par ne penser qu’à ça. Du coup, ils sont distraits. Et voilà comment, au lieu de tirer en l’air, ils flinguent du jeune de banlieue à tout va!
Il fallait y penser: les bavures sont un signe de concentration intellectuelle. Allez débinez les cognes quand vous avez compris ça!
En fait, je peux bien vous le dire, moi c’est pareil! J’ai mes préférences, comme l’Onfray. Ainsi tenez, quitte à me faire enculer de force, j’aime autant que mon violeur ait une toute petite bite…
Ici, je vous devine, femmes et hommes de peu de foi démocratique, qui ne voyez pas le rapport (sexuel, pourtant), vous allez me dire : Et si on ne veut pas se faire violer du tout? Ni surveiller!
Et je vous répondrai: «Vous ne seriez pas un peu idéalistes, des fois?»
Merci à Mona Chollet qui a signalé l’entretien sur Twitter.