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Publié par Christian Hivert

jus d'orangeFace à l’absurde j'éclatais hilare, c'était mon symptôme, ça l'est toujours depuis et rien ne l’élimine, il se façonne et façonne tous les âges de mon existence, en moi il est une lutte furieuse ou impassible contre ma perte, fonde ma fortune, attendait de ton amour Dominique, de tout amour.

 

La lisière supérieure de cette manifestation d'absurdité hilarante est une dépendance à l’égard du désir de l’autre sans quoi je ne suis plus qu'un poupon dans une maison des pleurs, cela constitue un toit dans ce toi qui est en moi, en quelque sorte, alors que ton désir m'a fui.

 

Les cognitivistes et autres mathématiciens des humeurs humaines sauront-ils un jour régler finement ce variateur de ma tristesse infinie, Dominique, si je pouvais me dire un jour que tu y es pour quelque chose, je viendrai te trouver sans tarder, mais cela échappait à tes quatorze ans et demi.

 

J'ai eu seize ans un jour, Dominique, et tu étais tout, et les plus beaux espoirs de la vie, et les promesses les plus chaleureuses de l'humain, toutes les envies de performance, la libération d'un être enfoui, mais la jeune fille était prétentieuse et très enfantine, elle mentait déjà, je l'ai crue.

 

Arthur venait de s'effondrer en larmes, au beau milieu de la rue, les C.R.S. avaient joué le jeu, la salle s'était vidée dans le plus grand calme, et puis trois policiers en civil s'étaient rué sur Jean-Philippe et l'avaient embarqué en hurlant c'est lui, c'est lui, ils réglaient le compte de l'activiste.

 

Les adroits et très courageux lanceurs de canettes de bières et d'objets lourds s'étaient enfuis par les toits dans la rue parallèle, la solidarité pour eux était toujours à sens unique, de vrais fournisseurs de prisonniers et constructeurs de déceptions militantes, décourageant même l'azur.

 

Seul et debout sur un banc, pleurant devant l'absurde devenu hilare, Arthur eut une rage inhabituelle, ces prétendus invisibles commençaient à l'épuiser, la somme de coïncidences et de fiascos dont ils étaient à l'origine depuis les attaques massives contre le comité des mal-logés était démesurée.


Cela dépassait largement le simple cadre d'une réponse à une question du genre, sont-ils payés, maladroits, conscients et donc motivés ou inconscients, demeurés et d'autant plus dangereux, mais tant que leur présence serait si peu combattue les luttes radicales étaient perdues d'avance.

 

Il se produisait le même phénomène que dix ans plus tôt, lorsque Arthur avait commencer à nouer des contacts en compagnie de Patrice avec les Autonomes rescapés de la décomposition du mouvement de 1980, la même arrogance et le même mépris destructeur, la même confusion.

 

De loin Arthur avait pu observer leurs manœuvres discrètes, ils s'étaient lentement mais sûrement diffusé dans tous les petits squats d'habitations, et peu à peu les uns s'étaient écartés des autres, beaucoup avaient déjà fui ou préparaient leur départ pour un coin d'azur en Province, tous déçus.

 

Arthur savait déjà que c'était foutu, ceux qui voudraient lutter de façon autonome les auraient toujours sur le dos, eux ou des responsables autoproclamés, ils faisaient le même travail, celui de la bourgeoisie nazie mondiale, il n'était plus temps de se demander s'ils en étaient conscients.

 

Bon Arthur cesse de rêver, il va falloir le sortir de là maintenant, et demain c'est le week-end, ils vont le mettre en pot à la souricière et le déferrer lundi en flagrant délit, si on n'obtient rien demain c'est cuit, il prendra pour les autres, oui Dominique, tu as raison, rentrons et dormons.

 

Dans une sourde clameur intérieure il avait mesuré l'écart s'amplifiant entre les squatteurs un temps solidaires, les courageux du jet de canette de bière n'avaient pas hésité à vivre leur fantasme guerrier en dépit de la sécurité des lieux occupés, laissant des prisonniers derrière leur gloire.

 

Passant du paroxysme du discours à la solitude de leurs plaisirs onanistes, après avoir pratiqué les virgules jusqu’à l’usure, ces plus autonomes que tous réunis commençaient patiemment et cyniquement à saccager ce qu'ils ne parvenaient à circonvenir, que leur arrivait-il ?


Arthur les connaissait tous, il en influençait encore quelques uns mais il sentait bien la fin de cette ascendance, quels intérêts occultes pouvaient être à l'œuvre avec une telle force que nulle raison, nul appel ne saurait maintenant faire fléchir, Arthur se désespérait, comment agir ?

 

Dominique alors vint l'enjôler à nouveau, allons, allons, petit gars on se redresse, on est fier, tu n'as pas failli, tu as toujours tenu tous les engagements que tu t'étais fait, tu es resté jusqu'au bout, que veux tu combattre lorsque tous s'allient, les maîtres et leurs domestiques  face à nos vies ?

 

Comment cela, mais tu sais déjà, que crains-tu de découvrir, certains parmi vous sont aux ordres, tu l'as toujours su, mais cela ne te dérangeait pas puisque ton comité progressait, maintenant qu'il est promis à l'anéantissement tu les trouves trop efficaces, ils sont comme une tenaille.

 

Comme pour tes amours toujours déçues sont ces forces de lutte qui toujours, dans les pires moments, se dérobent, vingt ans plus tard à l’évocation d’un souvenir d’enfance, tu sanglotes, et Tonton a dit qu'il ne fallait pas que les manques de logements sociaux fassent le lit des révolutionnaires.

 

Le Comité a vécu et tout ceux qui vous suivront y perdront des plumes, vous aurez du mal à récupérer Jean Philippe, ce n'est qu'un avertissement, et il n' y a plus aucune solidarité, tu les as vu faire sous ton nez tous ces petits invisibles avec leurs perfidies, leurs cancans, leurs séparations.

 

Je ne voulais pas voir Dominique, je ne voulais pas savoir, bien sûr tu voulais une carrière, tu voulais être importante, tu voulais être du côté du manche, faire partie des puissants et je voulais que tu m'aimes et soit fière, que le dessus du panier entende ma voix et s'attarde à mes attentes.

 

Oui Dominique je n'ai pas encore cessé de rêver, je crois toujours ton amitié possible, je crois la justice sociale nécessaire, je ne renonce pas à ton regard fier de moi, je ne renonce pas à la reconnaissance de chaque être, je crois en la valeur des humains un jour, en ta bienveillance.

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