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Publié par Christian Hivert

Pareil--pas-pareil-02.jpgDonc il savait courir, le gibier suivi avait pris une petite rue enfin sans grand monde, puis sans personne hormis le porteur de portefeuille et lui, il lui fallait se rapprocher sans inquiéter l'autre ni l'éveiller, ce n'était pas simple, il allégea ses pas sur l'asphalte jusqu'au murmure de son ombre.

 

Arthur pressentait que tout le monde pouvait flairer un danger, même sans le voir, même en ayant le dos tourné, par les effluves insensibles, il se concentra pour modifier les siennes, avoir de bonnes effluves, faire fuir la peur de lui, il se força à respirer, en poussant ses enjambés, dans un souffle.

 

Il lui fallait se vider la tête de sa peur asphyxiante et de ses questions, il était trop tard pour réfléchir désormais, le bouillonnement hormonal gelait ses capacités cérébrales, il était comme défoncé, insensible, il avait son plan, maintenant il lui fallait l'exécuter sans coup férir, il pressa le pas.

 

De toutes façons je suis bien tranquille Dominique, tu ne viendrais pas me voir en prison, tu n'as rien à faire avec les loosers, de grands projets t'attendent, comment faire gagner de l'argent à ceux qui ont tout l'argent, cela ne laisse plus beaucoup de temps pour s'intéresser au monde, c'est fait pour.

 

L'affaire était simple quoi, il s'élança, dans un pas il serait dans sa foulée, il l'avait rattrapé à une vitesse folle, l'autre n'avait encore rien senti, un autre pas et il verrait la buée de sa respiration dans l'air glacé, c'était maintenant, il fallait agir, en deux sauts il le doubla en se retournant vivement.

 

"Excusez-moi Monsieur, avez vous l'heure s'il vous plait?" L'autre lui répondit sans aucun étonnement, "Il est onze heures vingt mon p'tit!" "Ah, merci bien Monsieur, bonne soirée" et il fila encore groggy par la décharge d'adrénaline, récupérant bien vite le chemin des grands boulevards.

 

Il s'en alla se cacher dans l'anonymat de la foule des noctambules déambulant. L'autre avait grognassé derrière lui "Et en plus, je n'ai jamais rien sur moi, mon p'tit!" il avait tout le poids de la honte alourdissant ses épaules et se mélangeant aux volutes de la peur, il n'était pas taillé pour cela.


Cela lui fit du bien de savoir cela, il avait trop de conscience pour être un voyou sans complexes, et pas assez d'indifférence pour être un honnête citoyen sans remords, Arthur s'engluait, s'empêtrait, se perdait, mais était soulagé, il lui faudrait trouver autre chose, il ne prendrait pas ce vil chemin.

 

C'est étonnant, il faut nécessairement que tu vérifies tout, que tu te prouves les impossibilités de ton utopie, tout cela à déjà tant de fois été tenté, oui Dominique, mais pas par moi, il faut que je le sente en moi, aussi fort que je t'ai senti dans mes bras ce triste et dernier jour où nous nous sommes vus.

 

S'ils ne bougeaient pas ils allaient mourir, Arthur fit mentalement l'inventaire des possibilités qui s'offraient à lui, travailler, dans les circonstances actuelles il ne se sentait pas motivé, voler, il avait essayé et il ne se sentait pas taillé pour, sa morale personnelle peut-être, mendier, il était bien trop fier.

 

J.P., le copain de Rosalie, monnayait son homosexualité dans le quartier rouge à Amsterdam, et Rue Sainte Anne lorsqu'il était à Paris, c'était en dessous de l'Opéra Garnier, il y serait en vingt minutes, il ne connaissait pas, il fallait tenter, il n'avait pas de morale au niveau du sexe, Reine ne lui en voudrait pas.

 

Arrivé dans la rue il la parcourut plusieurs fois pour voir comment les autres faisaient, comment cela se passait, puis il se décida à s'exposer de manière non équivoque, tout en bas de la rue, son visage blême éclairé par les néons nocturnes de la vitrine nue de la Banque, derrière lui.

 

Te voici donc marchandise maintenant, la société de consommation s'offre cela Dominique, on se paye la jouissance de corps vivants, tu accomplis là ton destin d'esclave jusqu'au bout, tout plutôt que d'être bourreau ou complice, mais quand même la dignité humaine, qui se trouve dégradé?

 

Il n'aimait pas taper les potes, mais il fit le tour exhaustif des nouvelles relations tissées au fil du temps, depuis Le Nord Sud jusqu'aux Vignoles, en passant par la banlieue et la place de Clichy, aucune solution ne pourrait venir de ce côté-là, et le souvenir lui revint, c'était dans un bar,  rue d'Avron.


Deux jeunes types étaient venus le voir, et l'entreprirent directement. Il les avaient déjà vu aux fêtes du bar sauvage. "Tiens viens on t'offre un pot" "Viens t'asseoir, on va se mettre dans le fond" Arthur commençait à  être connu dans le quartier, leurs animations étaient appréciées, le bar était fermé.

 

Alors Arthur pensa à une proposition nouvelle d'activité, un nouveau local, ces deux jeunes étaient restés discrets, mais on voyait bien qu'ils appréciaient l'ambiance du bar sauvage, ils étaient venus plusieurs fois, sans tellement se mêler à toute la bande, dans la semaine on ne les voyait plus.

 

"Alors, votre bar est fermé, tu es au chômage?" Arthur s'esclaffa "On peut dire cela comme cela, en effet, les anciens ne veulent plus de nous" "C'est peut-être tant mieux, on les a déjà vu passer, c'est des branleurs, ils regardent le monde de haut, personne ne les aime vraiment dans le coin."

 

"Mais toi tu n'as pas besoin d'eux pour exister, tu assures drôlement dis donc, c'est sur toi que reposait le bar, le jour des bagarres, tu n'aurais pas été là ça dégénérait, le grand gueulard d'Autonome, il se serait fait flinguer par Mouloud, on le connaît, il n'aurait pas hésité à tirer, c'est un félé celui-là."

 

"Et toi tu es resté calme, sobre, tu t'es mis au milieu, tu es resté entre eux alors que t'es complètement gringale, tu savais que Mouloud portait un flingue, et t'avais le géant hurlant de l'autre côté, tu ne t'es pas dégonflé, tu as protégé ton histoire, tu n'as pas froid aux yeux, et tu as un super sang-froid"

 

Le deuxième enchaina, "ah ouais, tu as été super, tu ne t'es pas démonté, tu es vraiment impressionnant, là tu m'as épaté". En même temps que les oreilles d'Arthur rosissaient devant tant d'éloges, son esprit critique toujours avivé entendit au loin et faiblement quelques clochettes d'alarme.

 

Arthur n'avait pas pour habitude de se faire reluire la notoriété, avec les anciens du local, c'était même plutôt l'inverse, pas tout à fait un dénigrement systématique, mais une condescendance dépréciative de tous les instants de ses initiatives et des constructions de ses projets, alors cela changeait.

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