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Publié par Christian Hivert

pelican.jpgCommentaire très pertinent d'un anonyme auquel je souscris entièrement

À propos de L’insurrection qui vient

Je trouve que L’insurrection qui vient a huit défauts rédhibitoires.

1) Son catastrophisme, qui est annoncé dès le titre et se traduit par toute une série de clichés : l’auteur dénonce un « présent sans issue », l’« impasse du présent », l’ « état pathologique » de la société, la « décadence de l’institution scolaire », des « rapports sociaux » qui « agonisent », un « quadrillage policier », un « mur invisible » et la présence de drones – allusion à la Palestine et parallèle implicite et grotesque entre les opérations de la BAC et des CRS en banlieue et l’occupation de l’armée israélienne. Face à une telle situation, « tout ne peut aller que de mal en pis », car « dans la marmite sociale… la pression ne cesse de monter », que « les milices se multiplieront », qu’une « coexistence cessera bientôt », et que, bien sûr, « une décision est proche ». L’auteur fait par ailleurs l’apologie d’une « envie de destruction salvatrice », sans préciser ce qu’il souhaite voir détruire ni comment ni par qui.

2) Une surinterprétation de faits isolés, sans lien les uns avec les autres, et l’absence de données concrètes, chiffrées, sur la société française.

C’est ainsi que l’auteur affirme péremptoirement : « c’est en fait contre le vote lui-même que l’on continue de voter » (on retrouve la même idée bancale dans Les mouvements sont faits pour mourir), alors que les chiffres de participation record aux dernières présidentielles et ensuite la grogne des jeunes dans les manif contre l’élection de Sarkozy montrent, au contraire, que beaucoup de gens croient encore aux élections, y compris parmi les jeunes des banlieues populaires – sinon on se demande bien pourquoi ils auraient voté en masse pour Ségolène Royal !

L’auteur fait une référence chic et choc à l’Argentine : « Que se vayan todos » (Qu’ils s’en aillent tous) « commence à sérieusement hanter les têtes dirigeantes ».

Un, la crise économique de la société française n’a rien à voir avec celle de l’Argentine en 1999 ; et deux, l’Argentinazo s’est terminé en eau de boudin, et le retour de Menem au pouvoir n’a vraiment pas de quoi inquiéter les bourgeois ni argentins ou…français !

Autre exemple de tarasconade : des « rues entières de Barcelone ont brûlé en solidarité » avec les émeutes parisiennes. La formule est suffisamment vague pour être inattaquable (si deux rues ont « brûlé », cela suffit pour être exact), mais elle ne nous apprend rien ni sur l’Espagne, ni sur ce qui serait advenu de merveilleux après cet « incendie » contestataire….

3) Un optimisme qui n’a besoin de fournir aucune preuve

C’est ainsi que, d’après l’auteur, nous serions dans une « décennie pleine de promesses », marquée par des « frappes nocturnes, des attaques anonymes, des destructions sans phrases » (sans plus de précisions). Les émeutes de 2005 seraient un « quasi-soulèvement » (on admirera l’usage du mot « quasi » qui permet d’affirmer… quasiment n’importe quoi). Et l’auteur voit « naître de troublantes formes d’affectivité collective » dont il se garde bien de préciser la nature, la durée et l’étendue.

4) La volonté d’exprimer la révolte d’un public très restreint : les djeuns.

L’auteur fait exclusivement référence aux « mouvements autonomes de la jeunesse depuis 30 ans » et au « refus du travail d’une fraction de la jeunesse ». J’avais plutôt l’impression qu’en fait de « refus du travail », c’est plutôt un refus des capitalistes de leur donner du boulot qui caractérisait la période actuelle….

5) Une critique ambiguë des effets de la mondialisation : « nous avons été expropriés de notre langue par l’enseignement, de nos chansons par la variété, de nos chairs par la pornographie de masse ». L’auteur tombe dans la nostalgie d’un mythique paradis perdu : « tout ce qui a si évidemment déserté les rapports sociaux contemporains : la chaleur, la simplicité, la vérité, une vie sans théâtre ni spectateur ». Comme si dans les sociétés d’exploitation antérieures, féodale ou esclavagiste, il faisait bon vivre !

6) La citation de faits divers mis bout à bout sans offrir la moindre analyse « Deux enfants de 10 ans [ont été »] inculpés pour l’incendie d’une ludothèque », s’indigne l’auteur sans nous indiquer ce qu’il pense de l’acte lui-même et ce qu’il faudrait faire face à un tel événement. On suppose qu’il approuve tout simplement cette action imbécile puisqu’en parlant d’une école qui a brûlé, il écrit « nous nous souvenons combien, enfants, nous en avions rêvé ». Ce n’est plus « Prolétaires de tous les pays unissez-vous », mais « Enfants de tous les pays brûlez les livres et les écoles ! » Il dénonce, sans le nommer, « un intellectuel de gauche » qui éructe « sur la barbarie des bandes de jeunes qui hèlent les passants dans la rue, volent à l’étalage, incendient des voitures, et jouent au chat et à la souris avec les CRS ». Comme si ces différents actes étaient commis par les mêmes personnes, avaient les mêmes significations et la même portée sociale et politique. On dirait du Finkielkraut en verlan…

Le comble du ridicule est atteint lorsque l’auteur se plaint de vivre dans un « pays où un enfant que l’on prend à chanter à son gré se fait inévitablement rabrouer d’un Arrête tu vas faire pleuvoir » !

7) Un programme très limité, voire politiquement indigent : « se battre dans la rue, s’accaparer des maisons vides, ne pas travailler, s’aimer follement et voler dans les magasins ». Un vrai inventaire à la Prévert :: il aurait pu ajouter jouer du banjo et faire du deltaplane !

8) Un usage immodéré et suspect de l’expression « le Français ». Retourner le discours nationaliste contre lui-même n’aboutit qu’à une « haine de soi » suspecte. « Le Français » n’existe que dans la tête du Front national ou des chauvins de droite et de gauche.

L’insurrection qui vient n’offre aucune analyse des classes sociales, de la réalité économique en France ou en Europe, des rapports de forces, de la période dans laquelle on se situe aujourd’hui. Ce n’est qu’un long discours bavard et anhistorique. La seule référence militaire est une allusion à la Résistance de Guingouin, un vieux mythe stalino-maoïste que l’on croyait définitivement enterré. L’auteur fait preuve d’une naïveté sans bornes s’il croit que les forces de répression et l’appareil d’Etat s’écrouleront tout seuls. Son discours antiflics (pas plus radical que celui des rappeurs moyens partisans du capitalisme de la petite entreprise), ses brèves références emphatiques à la révolution de 1848, à la Commune de Paris ou à Octobre 1917, lui permettent de faire l’économie d’une analyse des forces de répression et d’un travail politique éventuel à mener en leur sein ou en leur direction. Après nous avoir dressé l’éloge de la Résistance bourgeoise stalinienne (qui n’avait qu’une seule qualité, celle de ne pas être pacifiste), voilà que l’auteur prétend qu’il faudrait s’emparer des armes… pour ne pas s’en servir. Désopilant…

On retrouve la même absence de sérieux dans l’apologie de « l’interruption des flux » qui aurait, selon l’auteur, des vertus révolutionnaires. Dans la situation actuelle, bloquer des autoroutes, des voies de chemins de fer, des gares, ne peut que désigner des cibles minoritaires et isolées à la répression étatique. De plus, il s’agit dans l’esprit des « interrupteurs » d’obliger les prolétaires à rompre avec la dynamique métro/voiture-boulot-dodo. Une telle attitude est bien typique de militants qui croient que les exploités ne sont pas capables de prendre eux-mêmes la décision de refuser d’aller travailler, d’occuper leurs lieux de travail, etc.

Si je voulais absolument chercher à sauver ce livre, je dirais qu’il y quelques aspects (pas du tout originaux mais c’est une autre question) qui m’ont plu ou dans lesquels j’ai pu me reconnaître de façon fugace : la critique de l’individualisme, des mécanismes de la domination, de la famille, de la publicité, du rôle des psy ; l’éloge de l’inadaptation, de la révolte ; la critique du rôle de l’Etat, de la xénophobie, de l’Ecole (sélection, compétition), du couple, la critique de l’écologie comme soutien à un capitalisme éthique. Malheureusement toutes ces questions sont abordées à toute vitesse sans jamais approfondir une seule idée, un seul thème. On a vraiment l’impression que l’auteur, dans la bonne tradition situationniste, a surtout cherché à écrire des phrases ronflantes, sans chercher à argumenter ni convaincre. Bref qu’il était dans un trip narcissique radical.
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