Holocauste de mal-logés, le procés Vincent Auriol reprend...
Le 92 rue de la Fontaine au Roi était un immeuble HLM neuf à
peine terminé, en état d’être habité, les clés avaient été trouvées par Arthur dans l’appartement où le chef de chantier avait installé son bureau au 1er étage. Les serrures avaient été changées
en une heure de temps.
Le Dimanche matin de l'ouverture des policiers étaient visibles partout. Tout le monde pensait que l'affaire était à l'eau. En fait c’était un dispositif de protection de Chirac venu inaugurer une crèche dans le quartier. Arthur en fixant la banderole sur le toit pouvait voir la série de voitures noires.
Cet immeuble accueillait la permanence du comité des mal-logés la plus offensive et la plus efficace. Le responsable du soixante sept avait mis trois ans à devenir membre du comité et désormais il tentait de s'en faire passer pour responsable. Ceux de la Fontaine au Roi lui résistaient.
Au téléphone, les ministères concernés avaient été clairs. "Voyons Monsieur, comment voulez vous que l'on négocie avec vous si vous ne représentez que vous-même? Vous devez réussir à prendre la tête de ce comité qui n'en fait qu'à sa tête!" Le haut parleur était branché, Reine avait entendu.
"La mouette rieuse", bar associatif, se changea en dépôt de subsistance et endroit de réunion. La place de la Réunion auparavant peu connue fut à la une de l’actualité et devint un lieu emblématique où étaient préparés des forums ouverts à tous et des réunions de solidarité. De toute la France on affluait.
Une télévision fut disposée pour regarder les journaux télévisés, poussés, les Crs abandonnèrent les lieux. Commença après le temps de l’attente pour un relogement non au cas par cas mais collectivement. En septembre 1990 les deux dernières familles furent relogées, un été sur le sable.
En septembre 1990 les travaux de démolition d’une partie du quartier continuèrent, le terrain d’aventures fut détruit et l’usine de chocolats n’a pas résisté à l’action des bulldozers. Plusieurs sans logis s'étaient installés dans le square pour voir le spectacle, les tentes étaient démontées
Beaucoup de mouvements avaient soutenu, Emmaüs, le Secours Catholique, Médecins du Monde, la CNT, la FEN, la CFDT, la CGT, la gauche et l’extrême gauche étaient là, sauf le PS. France Soir citait leur note interne expliquant que les militants du CML étaient dangereux et avaient des visées terroristes.
Terminées les longues prises de paroles, le programme de relogement des plus démunis allait pouvoir démarrer sans opposition notable. Les constructions de logement sociaux sévèrement ralenties ou annulées, les augmentations de loyers faramineuses, les taudis infects vite repeints et gérés, puis brûlés.
Les associations de Gens Bons administrèrent des entassements hétéroclites de pauvres dans des immeubles délabrés. Lorsque ces immeubles brûlèrent comme Boulevard Vincent Auriol quinze ans plus tard personne ne se sentit responsable, les irresponsables du comité refusaient ces taudis.
Arthur s’était peu à peu écarté de tout et rapproché de sa compagne. Le Comité des Mal-Logés s’était auto dissous. L’objectif des Gens Bons était atteint, les mal-logés ne prendraient plus eux-mêmes les décisions les concernant. On pourrait les soutenir, pourvu qu'ils n'aient jamais les mêmes droits.
Et puis les classes moyennes avaient racheté les taudis expulsés du quartier Vignoles Haies. Ils allaient enfin pouvoir posément valoriser leurs opérations et se réinventer une vie de quartier, en toute sécurité pour leurs enfants, la convivialité sociale dans la mixité, les associations de proximité.
Et tous ces responsables de la misère
et de ses conséquences les plus dramatiques continueraient sans cesse de se présenter comme des Gens Bons, ne seraient jamais jugés, jamais condamnés, alors que leur condescendance et leur
mépris de cadres des luttes de pauvres tuait horriblement.