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Publié par Christian Hivert

Proie

Kahina finissait de rouler le pétard. « Du sérieux, ma sœur, du sérieux, nous avons rendez- vous avec l’avenir ! » Nora intervenait, elle fila à demi-nue, le reste protégé par une grande serviette de bain, sous la grande couette. La nuque réceptionnée par la taie d’oreiller, elle demanda :

  • Et mon café ?

Il y a de ces princesses, parfois, pour vous rappeler la beauté des instants. Kahina sourit à sa robe noire boutonnée sur le devant. Elle servit un café à sa sœur. Arthur devenait comme un chat en quête de ronronnement. Il devenait comme un gamin puceau au bordel, en plein bonheur.

Malgré toutes ses manières et ses rondeurs enveloppantes, Arthur devenait transparent à Kahina, et, à partir de ce moment, elle l’aima, à sa manière. Elle lui reconnaissait d’emblée le courage et la sincérité, ce n’était toujours pas le Prince Charmant. Elle souriait toujours, finaude.

Ils étaient partis peu après. Nora était impatiente de pouvoir négocier, et Kahina temporisait. Ils partirent en métro, puis à pied. Arthur se sentait entraîné dans un désordre inconnu. Kahina avait encore un œil traînant derrière elle. En conscience, elle avait un impact sur l’environnement, le troublait.

Puis Kahina pensa à Arthur, elle se fit jeune fille, ne voulut pas l’intimider. N’était-il pas le compagnon tranquille dont sa vie avait tant manqué depuis son adolescence ? Et si ce jour était le début d’une fable solennelle ? Kahina eut le pressentiment d’un assentiment, d’une aventure.

Elle fut émue à cette danse de pas de chat feutrés. Arthur enveloppait de sa présence ses rondeurs charnues sans jamais les toucher. Elle s’enivrait de désirs purs, le vent la frôlait. Sa puissance était encore plus forte qu’elle ne l’imaginait. Même des types bien s’intéressaient à elle, la suivaient.

Elle eut envie de le séduire, il était visiblement déjà amoureux. Lui faire oublier ses cuisses, ses seins, ses reins. Elle ne pouvait pas s’amocher, tout de même. Et puis elle ne lui réservait aucune exclusivité, elle resterait libre ! Elle ne le rejetterait pas, il lui plaisait. Resterait-il ?

Était-ce cette naïveté originelle de l’enfance des humains ? Ce regard clair de puceau, cette espérance et ce respect ? Il était touchant, le seul depuis longtemps, le seul depuis tout le temps. Elle se surprenait à vouloir de son affection. Elle espérait ses attentions les plus courtoises.

Ils filaient tous les trois le long des rues du onzième, il ne fallait pas louper le rendez-vous. Nora râlait en se retournant. « Speedez-vous, c’est important ! » Arthur ne voulut pas quitter les pas de Kahina. Elle lui en sut gré, elle accéléra. Il ne fallait pas faire attendre Nora, c’était important.

 

 

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