Colonies nazies
Le déshonneur de la France
Non, il ne s’agit pas de l’équipe de France de foot, mais d’une réflexion sur les notions d’honneur et de déshonneur qui ont cours dans les médias. La vague
d’hystérie nationale qui a submergé le pays à la révélation horrifique du gros mot qu’Anelka a adressé à l’entraîneur de l’équipe de France de foot s’est traduite par une inflation rhétorique
sans précédent.
« désastre », « honte », « mafia », « racaille », « voyous » ne
sont que les plus doux des vocables qu’on a entendus. Le monde politico- médiatique s’est déchaîné en leçons de morale d’un grotesque achevé dont apparemment il n’a aucune conscience, ce qui
est bien le plus consternant.
Il s’agit de savoir en effet où nous mettons notre honneur national. De ce point de vue l’échelle des valeurs est totalement renversée : affaire d’État sur
un sujet futile, détail sans importance sur les sujets les plus graves. Il y a là de quoi s’inquiéter pour la santé morale de notre pays.
Le président Sarkozy a été vu, lors du sommet franco-africain de Nice le 31 mai, cajolant les plus corrompus des dictateurs africains dont il a trouvé flatteur de
s’entourer. Le public était prié de voir là une image de la grandeur et du prestige de la France dans le monde. En réalité on exaltait des prévaricateurs et des assassins dont, dans les pays
démocratiques, on répugne à serrer les mains.
Notre honneur national n’a pas de ces pudibonderies et n’était pas le moins du monde effarouché par ces fréquentations douteuses. Business is business, c’est le
seul principe de morale qui s’impose. Nous allons récidiver en allant applaudir le 14 juillet défilant sur les Champs Élysées, des bataillons appartenant à
des armées dont la fonction est de réprimer leurs propres concitoyens et ayant à leur actif nombre de massacres. Cette honte nationale n’a l’air d’émouvoir personne.
Que la politique s’affranchisse de toute morale, bien des gens, alléguant ce qu’ils croient une philosophie cynique et qui n’est qu’un vulgaire opportunisme, vous
diront que c’est normal, l’intérêt national devant l’emporter sur toute autre considération et l’axiome roi est que la fin justifie les moyens.
On trouverait cet étrange abandon des règles morales élémentaires moins choquant si les mêmes ne se révélaient les plus sévères censeurs des comportements de
catégories de la population jeunes et pauvres, deux circonstances, l’ignorance et le besoin, que toute philosophie morale considérera comme atténuantes, requérant plus l’admonestation, voire la
compassion, que l’anathème.
Dans La généalogie de la morale, Nietszche dit a peu près que les faibles ont inventé la morale pour se croire bons et non faibles. Je serais tentée de croire que
ce sont au contraire les maîtres, sachant que leur force n’est qu’apparente, qui ont inventé la morale pour maintenir leur pouvoir sur ceux qui se croient faibles.
En tout cas nous tomberons d’accord avec le philosophe quand il conclut que « la tâche du philosophe de l’avenir [se trouve ] dans la résolution du
problème de l’évaluation et de la détermination de la hiérarchie des valeurs ». La place attribuée ces jours-ci à la valeur honneur de la France, dit assez à quel rang le mettent ceux
qui l’invoquent.
Non, il ne s’agit pas de l’équipe de France de foot, mais d’une réflexion sur les notions d’honneur et de déshonneur qui ont cours dans les médias. La vague d’hystérie nationale qui a submergé le pays à la révélation horrifique du gros mot qu’Anelka a adressé à l’entraîneur de l’équipe de France de foot s’est traduite par une inflation rhétorique sans précédent.
« désastre », « honte », « mafia », « racaille », « voyous » ne sont que les plus doux des vocables qu’on a entendus. Le monde politico- médiatique s’est déchaîné en leçons de morale d’un grotesque achevé dont apparemment il n’a aucune conscience, ce qui est bien le plus consternant.
Il s’agit de savoir en effet où nous mettons notre honneur national. De ce point de vue l’échelle des valeurs est totalement renversée : affaire d’État sur un sujet futile, détail sans importance sur les sujets les plus graves. Il y a là de quoi s’inquiéter pour la santé morale de notre pays.
Le président Sarkozy a été vu, lors du sommet franco-africain de Nice le 31 mai, cajolant les plus corrompus des dictateurs africains dont il a trouvé flatteur de s’entourer. Le public était prié de voir là une image de la grandeur et du prestige de la France dans le monde. En réalité on exaltait des prévaricateurs et des assassins dont, dans les pays démocratiques, on répugne à serrer les mains.
Notre honneur national n’a pas de ces pudibonderies et n’était pas le moins du monde effarouché par ces fréquentations douteuses. Business is business, c’est le seul principe de morale qui s’impose. Nous allons récidiver en allant applaudir le 14 juillet défilant sur les Champs Élysées, des bataillons appartenant à des armées dont la fonction est de réprimer leurs propres concitoyens et ayant à leur actif nombre de massacres. Cette honte nationale n’a l’air d’émouvoir personne.
Que la politique s’affranchisse de toute morale, bien des gens, alléguant ce qu’ils croient une philosophie cynique et qui n’est qu’un vulgaire opportunisme, vous diront que c’est normal, l’intérêt national devant l’emporter sur toute autre considération et l’axiome roi est que la fin justifie les moyens.
On trouverait cet étrange abandon des règles morales élémentaires moins choquant si les mêmes ne se révélaient les plus sévères censeurs des comportements de catégories de la population jeunes et pauvres, deux circonstances, l’ignorance et le besoin, que toute philosophie morale considérera comme atténuantes, requérant plus l’admonestation, voire la compassion, que l’anathème.
Dans La généalogie de la morale, Nietszche dit a peu près que les faibles ont inventé la morale pour se croire bons et non faibles. Je serais tentée de croire que ce sont au contraire les maîtres, sachant que leur force n’est qu’apparente, qui ont inventé la morale pour maintenir leur pouvoir sur ceux qui se croient faibles.
En tout cas nous tomberons d’accord avec le philosophe quand il conclut que « la tâche du philosophe de l’avenir [se trouve ] dans la résolution du problème de l’évaluation et de la détermination de la hiérarchie des valeurs ». La place attribuée ces jours-ci à la valeur honneur de la France, dit assez à quel rang le mettent ceux qui l’invoquent.